Les tribulations d'un papa qui se prenait pour une maman

Les tribulations d'un papa qui se prenait pour une maman

Béquille à roulette

 

 

 

 

Depuis bientôt 3 mois je suis devenu une béquille à roulettes.

Tous les matins que Dieu fait (enfin si c'est lui qui les fait) , je grimpe dans ma voiture, et je roule vers les gens.Vers ceux qui ne peuvent plus marcher, ceux qui sont dépendants.

 

J'entre et remplis ma fonction de béquille.

 

J’épaule face à la vieillesse, je loue mes bras et mes jambes, mon savoir faire aussi, pour les aider à passer une nouvelle journée.

 

Je rentre dans des maisons où le temps a fuit, comme si devenir vieux c’était arrêter de rêver.

Pour certains chaque geste est lourd et pesant, Quand le gant chaud et parfumé vient se poser sur leurs corps et que la friction à l'eau de Cologne, ravivent leurs muscle, je vois dans leurs yeux que je suis la main qui aide à continuer.

 

Il s’agit de communication, d'un échange des plus francs.

En une heure dans chaque maison, je fais ce que je peux pour insuffler de la vie, la pudeur n'est pas de mise, je suis juste les bras et les jambes qu'il leur manque, et le cœur qui comprend que, se sentant au crépuscule, les forces manquent.

 

Il y a aussi les endroits improbables, des personnages insolites, tous touchants à leurs façons. Chez qui je remplis les placards et les frigos, un coup de ballet par ci un peu d’huile de coude par là, leur faire sentir ma présence et alimenter la conversation...

 

Le secteur où j'exerce est celui de la ville de Grigny. Dans un quartier des plus mal famés.

Aux carrefours il y a les « crieurs » qui sonnent l'alarme à chaque passage de la force publique.

Lorsque l'on arrive il faut montrer patte blanche, expliquer les raisons de sa présence à un jeune homme emmitouflé de noir, qui surveille son secteur. Une fois que l'on est connu il n'y a plus de problèmes...

 

Le marché coloré sent l’épice, des dizaines d’accents retentissent vantant leurs produits, chaque fois que je le traverse j'ai l'impression de voyager.

 

Il y a aussi les trajets « cul à cul » sur la N7 où il vous faut parfois 10 minutes pour faire un kilomètre, le stress des radars et des chauffards. L'obsession de la pompe les jours de grèves.

 

Je roule de l'un à l'autre et dés que j'ai fini je me dépêche de retrouver mon petit homme devant l’école...

Avec sa voix encore flûtée il me demande immanquablement « alors papa ça s'est bien passé avec tes pépés ? »

 

Le matin quand le réveil sonne je commence à rouler.

 


12042767_868916206549227_4919030481121020113_n.jpg



01/06/2016
3 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 34 autres membres