Chapitre 2
Mémé ne sachant plus que faire pour que je réagisse, m' a encouragé à bouger, et à aller voir ton cousin Grégory à Tarbes.
Je suis arrivé un jour de neige. La ville de ma naissance blanchissait sous mes pas. Je repensais à ma grand mère « maman Ninou », à ce pays rêvé qu 'était mon enfance. La bonne ville de Tarbes représentait tout cela.
Nos balades au jardin Massey, les jeux dans les arbres et les quatre-cents coups que nous faisions ma cousine Carole et moi. Les arrêts à la buvette, en sueur, vidés par nos pitreries. Ma grand mère était le rempart de mon enfance, le soleil de mes jeunes années. Ce n’était pas un hasard si le cœur dévasté, bien des années plus tard, je me précipitais dans la ville qui m'avait apporté tant de bonheur.
La dernière fois que je m’y étais rendu, c'était pour son enterrement. Un jour bien triste !
Grég vivait en banlieue de la ville.
Tandis que je me dirigeais vers sa maison, Je me rappelais nos souvenirs communs à l'époque bénie où sa mère était de ce monde.
Devant sa porte, je pris une profonde inspiration et frappais.
Il m’accueillit identique à lui même, ses inusables santiags aux pieds. Je sentais chez lui la fierté de me faire découvrir son antre : un petit meublé fonctionnel et agréable, idéal pour un célibataire. Sa cour regorgeait de plantes, il accordait une grande importance à son « jardin ».
Le fait de revoir Grégory me faisait un peu sortir de ma torpeur.
Il était descendu de Compiègne pour fuir son passé. Ses parents n'avaient pas su s'occuper de lui. Il avait été le témoin de la déchéance de sa mère et en avait bavé dans sa courte vie.
Son enfance avait été un enfer et de le voir fier et droit devant moi, me fit comprendre que je me noyais dans ma peine.
Il travaillait en intérim depuis quelques temps. Il partait tous les jours travailler, me laissant dans son appartement.
J’eus tout le loisir de pleurer, crier, maudire la vie durant ses absences.
Je m’anesthésiais sur ses jeux vidéo et lui préparais à manger lorsqu’il rentrait du travail. Parfois je sortais me promener, la neige apaisait mes angoisses.
Je n’allais pas bien loin, jusqu'à la cabine téléphonique où j’appelais le « nord », joignant des amis pour m’assurer que la vie continuait, que mes connaissances existaient toujours.
Nous formions un drôle de « couple » tous les deux. Je le regardais partir le matin, dans son bleu de chauffe.
Quand il revenait nous passions nos soirées à parler de jeux vidéos. Tout sauf la réalité, la tragédie quotidienne de nos deux vies !
Je pensais à sa mère et me dit qu'elle éprouverait de la joie à le voir à force de volonté, donner un sens à sa vie.
La nuit il dépliait son canapé un peu dur qui ne ménageait pas mon dos. Ce n’était pas grave, j’étais si bien auprès de lui.
Son gros berger allemand nommé Spock avait vainement essayé de me faire comprendre que j'étais sur son territoire, puis s’était résigné, il se contentait de m'apporter sa chaleur en se couchant près de moi.
Sentir la présence de Grég au dessus dans sa mezzanine me rassurait. Nous parlions un peu avant qu'il ne s'endorme et quand le silence se faisait, je restais là dans le noir, caressant la grosse boule de poil à mes côtés.
Avec son accent mi-picard, mi-pyrénéen il me faisait rire. J'admirais sa volonté et son opiniâtreté Du haut de sa vingtaine il m'a donné une leçon de courage et d’humilité.
Il m’a fallu une semaine pour reprendre pied. Pour m’imaginer un avenir, une raison de vivre, pour me faire à l’idée que je n’étais plus qu’un papa à mi-temps.
Je ne sais si Grég s’est rendu compte du service qu’il m’a rendu. Sa gentillesse et son optimisme m’ont sorti du « pays des fantômes »…
Lorsque je suis rentré à la maison ta mère avait pris ses affaires et était partie.
L’appartement presque vide fut un deuxième choc. Tout cela devenait concret. Et je dois dire bien ficelé.
Elle me faisait croire qu’elle faisait face seule avec courage à sa nouvelle existence.
Elle était déjà avec quelqu'un et semblait prête à vivre sa vie de conte de fées avec un homme qui avait les moyens de lui offrir les futilités dont elle rêvait.
En moins d'une semaine elle avait trouvé un appart, une nourrice et déménagé, balèze la dame !
Je me sentais au bord du gouffre sans rien pour me raccrocher. Je me répétais que si je ne pouvais plus te prendre j’irais rejoindre ma sœur de l’autre côté.
Des idées à la con quoi !
Il devait en être autrement et Laurence, à ce moment là fut la main tendue dont j' avais besoin.
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